L'histoire de Woodee Bikes, un entretien exclusif avec le fondateur, Bertrand.

Publié le : 17/08/2023 11:23:56
Catégories : Woodee Bikes

L'histoire de Woodee Bikes, un entretien exclusif avec le fondateur, Bertrand.

Bertrand, vous êtes le fondateur, créateur et dirigeant de l’entreprise Califorland qui est à l’origine des marques Buke et Woodee. Pouvez-vous nous raconter l’histoire de ces 2 marques qui sont les toutes premières à avoir démocratisé le Fat Bike en France ?

Bonjour et bienvenue chez Woodee Bikes. Je suis en effet à l’origine de la première marque de fat bike électrique sur Hossegor que j’avais baptisé à l’époque Buke Bikes. Le nom de Buke était un hommage à Duke Kahanamoku, le champion de natation et lifeguard Hawaiien qui a popularisé la pratique ancestrale du surf au début du siècle dernier, tout d’abord à Hawaii, puis en Californie, avant de connaitre le succès que l’on connait aujourd’hui un siècle plus tard. Ce nom du « Duke » associé à « Bike » a donné Buke, car l’idée de base était de proposer un vélo adapté aux surfeurs qui rêvaient d’un moyen pratique et légal pour faire le tour des spots de surf directement depuis la plage. Nos vélos sont homologués VAE, Vélo à Assistance Électrique, et sont autorisés par définition à rouler partout où un vélo classique à le droit de rouler, y compris sur les plages !

 

Quand avez-vous eu cette idée du fat bike, et comment l’avez-vous concrétisée ?

 

J’ai travaillé dans le surf, en créant dans les années 90 une petite marque de surf locale après mes études de gestion. Parallèlement, j’ai obtenu 2 brevets d’état, en ski et en surf, 2 disciplines que j’ai enseignées pendant une quinzaine d’années tout en dirigeant le club de surf local. Puis j’ai monté ma propre école de surf, du côté de Capbreton. Le surf représente une partie importante dans ma vie, d’abord comme passion, puis comme dirigeant.

A 46 ans j’ai pris conscience qu’il était peut-être temps de laisser la place aux jeunes, notamment dans l’enseignement, et j’ai décidé de démarrer une nouvelle aventure avec en ligne de mire la Californie, une région que ma famille et moi connaissons bien pour y avoir séjourné plusieurs fois. Le projet que j’avais sur place n’a pas pu se concrétiser, le timing n’était pas bon. Par contre j’ai découvert là-bas le Fat bike en 2013, sur la plage d’Huntington Beach. Une version musculaire. J’ai trouvé ça génial, assez physique mais très efficace dans le sable. J’ai tout de suite pensé que cela devrait avoir un joli succès chez nous, du côté d’Hossegor avec l’immense communauté de surfeurs et nos longues plages de sable. J’étais loin d’imaginer le carton que j’allais faire. Une fois rentré en France, j’ai imaginé un concept de location original à l’époque, qui proposerait une réservation en ligne et un retrait en shop d’une vraie gamme de matériel de surf offrant du matériel de qualité pour tous les niveaux : du débutant avec de la planche en mousse, au surfeur confirmé avec un partenariat avec Euroglass pour les planches performances et des grands noms du surf (Bradley, Phipps, Grace etc.) et Vissla (qui démarrait à l’époque) pour les combinaisons. J’ai ensuite fait un sourcing en Asie pour développer ma propre marque de planches de surf destinée aux surfeurs en progression ou débutants, ainsi que quelques skates, et j’ai décidé d’y ajouter de la location de Fat bike mais avec une assistance électrique, à mon avis indispensable compte tenu du poids et de la « traine » provoquée par les gros pneus larges…sans oublier la pratique dans le sable !

J’ai trouvé plusieurs sites de production en Chine, dans la région de Shanghai. J’ai fait le voyage sur place, visité de nombreuses usines, à la fois pour les planches de surf mais aussi les vélos à assistance électrique. J’ai fini par trouver la pépite avec le fameux Beach Cruiser Fat. J’ai passé mes commandes et j’ai travaillé sur le site internet de location en ligne, puis la recherche d’un local commercial.

J’ai été livré fin 2014, j’ai loué un local « avenue du Touring Club dont personne ne voulait à l’époque et j’ai démarré mon activité. Le premier Fat cruiser électrique n’était pas encore complètement déballé qu’il était déjà vendu ! Une cliente de Toulouse, qui cherchait une surprise pour un cadeau d’anniversaire. J’étais plutôt parti sur de la location, mais après avoir fait essayer ces machines à de nombreuse personnes, dont plusieurs dans le surf business, je m’étais préparé à l’éventualité de la vente. Les vélos plaisaient énormément. J’ai rapidement eu droit à un article dans le quotidien régional Sud Ouest afin de marquer d’une pierre blanche ce lancement original d’un nouveau produit typé à la fois surf et vélo au cœur du royaume du surf européen.

 

Existait-il une offre de Fat bike à cette époque ?

 

Le fat bike connaissait un véritable engouement cette année-là un peu partout dans le monde mais il n’était pas arrivé jusqu’à chez nous. La seule offre que j’ai découvert à Hossegor en même temps que je lançais la marque était le travail d’un artisan de grande qualité également passionné de surf, qui proposait des montages de kit électriques sur mesure à partir d’une base de fat bike musculaires typés VTT. A nous deux, nous formions une offre complémentaire, pour des puristes à la recherche de machines très performantes et plus couteuses fabriquées sur mesure, équipés de moteurs pédaliers très puissants, et Buke qui proposait des cruisers a des tarifs abordables et qui affichaient des performances honorables sur le sable et très agréables sur la route. Le look de nos BUKE était un joli succès, avec un cadre confortable pour cruiser, et un petit côté vintage.

Pour rappel, le vélo à assistance électrique était loin du succès et de la croissance connue ces dernières années. Je me souviens d’avoir échangé à l’époque avec le patron d’une grande chaine de location de vélos, l’un des plus gros loueurs de la côte Atlantique. Il m’avait confié que le Fat bike ne se vendait pas car trop physique, et que le vélo à assistance électrique ne se vendait pas non plus car trop cher. Bon, il suffisait de combiner les deux pour offrir un produit original et à succès.

 

Aujourd’hui vous n’êtes plus seul sur ce marché ?

 

Vous avez remarqué ?! (Rires)

Bon c’est simple, j’ai vendu 200 vélos à Hossegor dès le premier été, reçu des dizaines de proposition d’association plus ou moins sérieuses, de prêts privés, de promesses de partenariats… ça a été la folie. Je peux dire que j’ai mis le pied à l’étrier de l’ensemble des marques qui circulent autour d’Hossegor, tout d’abord en validant le modèle économique, puis en offrant le sourcing sur un plateau puisque ces marques étaient presque toutes des clients distributeurs avant de se lancer. Le Big Boss de Quiksilver (Boardriders) à l’époque, m’avait dit « Bertrand, il va falloir aller très vite, tu as un super produit et tu vas être copié » …il avait vu juste c’est le moins qu’on puisse dire. Dès l’année suivante, je voyais les premières copies de nos Buke Bikes, la machine s’emballait pour de bon en même temps que l’engouement pour les vélos à assistance électrique croissait rapidement. J’ai été au bon moment au bon endroit. J’ai pris beaucoup de risques en misant sur Hossegor car l’immobilier commercial est très cher, mais je savais que cet endroit concentre beaucoup de magie. J’ai vécu la montée en puissance du surf business européen pendant plusieurs décennies, et c’est chez nous, dans les Landes et bien sûr le Pays Basque, que l’alchimie c’est produite : Notre région offre à la fois une qualité de vie, un climat sain et vivifiant, un océan Atlantique généreux pour tous les passionnés de sports de glisse, mais aussi les amoureux de golf, de randonnée, sans oublier le ski l’Hiver. La culture, l’architecture, la gastronomie, de magnifiques paysages…viennent compléter le tableau. Et la meilleure façon de se déplacer dans nos petits périmètres côtiers s’avère être le vélo à assistance électrique.

Bref, tous les voyants se sont rapidement mis aux verts pour la commercialisation, même si le nombre d’opportunistes qui ont suivi nos traces a été beaucoup plus nombreux que ce que j’aurais pu imaginer.

 

Quelle a été votre stratégie face à cette concurrence ?

 

Dès 2015, j’ai pris la décision de redessiner les cadres des vélos afin de pouvoir les distinguer des copies, en insérant une plaque signature en bois sur l’avant haut du cadre. J’ai ainsi créé le premier « Wood’e » clin d’œil aux Woody Californien, ces magnifiques gros breaks avec des portes en bois qui transportaient les surfeurs californiens en plein cœur des fifties. Je tiens à ce que l’histoire de nos vélos reste connectée à l’histoire du surf, son art de vivre et la surf culture. D’ailleurs le Beach Cruiser, bien que dérivé du célèbre cadre de vélo hollandais, reste un objet propre à la cette culture. J’ai ensuite élargi la gamme, en créant le Surfliner, une machine améliorée, spécifiquement dédié au surf et au franchissement sur le sable. Avec des pneus encore plus larges, un moteur pédalier afin d’améliorer le couple, et un variateur de vitesse en lieu et place des vitesses traditionnelles : Buke a ainsi permis à de nombreux surfeurs d’accéder rapidement à de nombreux spots de rêve loin des accès habituels. Une fabrication en série nous a permis de tenir des prix encore raisonnables par rapport à un montage sur mesure. Ce modèle a connu un joli succès, et il est aujourd’hui un incontournable de notre marque : c’est LA référence pour les surfeurs, d’ailleurs son nom, le Surfliner, est le nom du train qui relie Los Angeles à San Diego et qui serpente le long de la côte, notamment sur la célèbre plage de Trestles au Sud de San Clemente et qui accueille la finale mondiale de la ligue de surf WSL.

Pour conforter notre position de leader, nous avons fait un gros travail de sourcing en sélectionnant la meilleure offre de motorisation Fat Bike de l’époque qui était assez restreinte, et nous avons augmenté la qualité de chacun des composants, en proposant de série des freins hydrauliques par exemple, ce qui n’est pas un luxe sur des machines relativement lourdes.

 

A ce propos, qu’est ce qui caractérise un bon fat bike aujourd’hui selon vous ?

 

En 2015, on va dire l’âge de pierre du Fat Bike électrique, l’offre était quasi nulle en motorisation de grande marque. Quelques fabricants de marques de vélo célèbres proposaient de rares modèles de VTT Fat équipés de moteurs pédalier de grande marque, avec batterie bouteilles (non intégrées). Ces marques ont tout de suite tapé dans le mille en travaillant avec des motoristes de qualité qui fournissait l’ensemble du groupe de motorisation : le moteur, la batterie, le câblage, les capteurs de pédalage, l’écran de contrôle. A l’époque, les seules marques de moteurs accessibles à une jeune start-up comme Buke étaient chinoises. Nous avons travaillé avec ces marques, en déplorant l’impossibilité d’obtenir de ces entreprises 100% des composants natifs de ces marques, batterie comprise, et spécifiques à la singularité du Fat Bike. En effet, un Fat bike ne se contente pas de rouler sur une route plate. En ce qui nous concerne, il doit être très performant sur le sable, en montée, dans le dur…l’équation à mettre en place tout en respectant les normes européennes (250w de puissance max, 25 km/h de vitesse max et pas de gâchette « accélérateur » au-delà de 6Kmh) s’est avérée complexe, surtout avec un moteur dans le moyeu de la roue arrière qui n’offre, de par son principe même, pas assez de couple et déséquilibre fortement le vélo avec tout son poids à l’arrière. C’est la raison pour laquelle en 2018, nous avons pris la décision de franchir un cap et de démarcher le N°1 mondial des composants vélo : le Japonais SHIMANO qui n’est plus à présenter, entreprise centenaire qui équipe la moitié des coureurs du tour de France et assure sa présence de Shimano Service Center tout autour du globe. Leur offre de motorisations venait de franchir un cap, avec un bel effort d’investissement dans le vélo à assistance électrique, notamment le VTT où leur modèle SHIMANO STEPS 8000 (moteur pédalier) accomplissait de véritables prouesses en franchissement. Ce choix nous a permis de prendre une énorme avance en termes de qualité face à nos concurrents qui sont restés sur des motorisations chinoises intégrant plusieurs composants de marques différentes, avec l’obligation de gâchettes pour compenser le manque d’efficacité au démarrage (capteur de rotation à base d’aimants, et non pas de couple avec pression.), et l’obligation de coupe circuit sur les freins… Bien évidemment nous avons continué la montée en gamme, avec des premières versions Cruiser à batteries totalement intégrées Shimano, une transmission et un freinage hydraulique haut de gamme le tout 100% Shimano. Donc pour répondre à votre question, nous sommes ainsi parvenus à développer en interne un vrai bon Fat bike performant, équilibré dans une conception intégrée, un centre de gravité légèrement vers l’avant grâce au changement de position de batterie, un moteur pédalier très coupleux (85 Nm au lieu de 40 Nm) et un passage de roue qui permet de passer d’une taille de pneu en 4.0 jusqu’à 4.5, voire 5.0 pour tous ceux qui exploitent leur machine sur le sable. Le soutien et la confiance de Shimano nous a encouragé dans cette voie : la qualité et la performance sont vraiment très impressionnantes, avec une fiabilité toujours pas mise en défaut. Nous travaillons d’ailleurs désormais directement avec Shimano France où leur équipe est aussi accessible que passionnée et à l’écoute pour nous accompagner dans notre développement.

 

Comment s’est opéré le changement de nom de la marque, de Buke à Woodee?

 

Ce changement s’est fait naturellement. Lorsque nous avons décidé de nous démarquer en montant l’ensemble de la gamme en qualité avec Shimano. Il faut savoir que quasiment toute l’offre Fat Bike à part la nôtre et quelques grandes marques (dont les productions sont très marginales), repose uniquement sur les mêmes fournisseurs chinois qui inondent le marché mondial en approvisionnant différents distributeurs qui se contentent de poser des autocollants de leur marque pour signer les mêmes cadres de vélo équipés des mêmes moteurs chinois. Ce cadre, c’est le tout premier Buke, en version classique ou col de cygne, copié et archi copié. Même le modèle à plaque en bois, notre premier Wood’e, a été copié sans scrupules par une usine chinoise qui l’a proposé à un importateur bordelais ! Donc ce passage en tout intégré 100% Shimano devait marquer la différence face à cette concurrence asiatique bon marché et peu qualitative qui risquait de nous coller à la peau ! Hossegor et notre région méritent mieux que ça ! Le modèle déposé Wood’e a été utilisé et transformé en marque Woodee, un nom que nous avions pu tester pendant 3 ans, très apprécié de la clientèle, et qui reprend parfaitement la philosophie et l’ADN de la marque : un nom sympa, facile à retenir, déjà courant dans la culture surf, et même cinématographique ! Le logo a été redessiné, et la petite pomme de pin qui signait le logo Buke est devenue l’emblème de la marque frappée d’un joli « W » : cette pomme de pin est bien sûr emblématique des Landes de Gascogne, d’Hossegor, des magnifiques forêts landaises. Cette marque inaugure donc une nouvelle collection complète de Fat Bikes équipes des composants derniers cris, et sur ce qui se fait de mieux en termes d’intégration, notamment nos batteries Shimano et la motorisation du dernier modèle EP8, l’évolution du Shimano Steps 8000. Des modèles désormais uniques, totalement homologués pour la route comme n’importe quel VAE, extrêmement fiables et qui bénéficient du réseau de garanties et d’entretien SHIMANO.

 

Quels sont les prochaines étapes de développement pour Woodee ?

 

Nous allons élargir la gamme Woodee avec 3 nouveaux venus, et notamment 2 modèles pour les Teenagers (ou les jeunes adultes) que nous avions déjà lancé avec Buke (le Wood’e teen) et qui a convertit un paquet de gamin du côté des Landes au vélo électrique plutôt qu’au scooter, comme quoi, quand les produits sont sympas, il y a moyen de plaire à tous les publics. C’est une petite fierté de voir tous ces jeunes, prendre un peu plus de temps pour aller au collège ou retrouver leurs copains à 25 Km/h sur des pistes cyclables plutôt qu’à 50 sur des petites routes.

Nos best sellers, les Coastliners et Surfliners sont les piliers de la marque, avec des cadres ouverts (Swan) ou classique, et également des versions typées plus VTC pour tous ceux qui n’ont pas l’opportunité, ni l’envie de rouler ailleurs que sur la route ou les chemins.

Nous avons également renforcé l’équipe, grâce à l’arrivée de nouveaux investisseurs depuis 2021 : des partenaires passionnés, qui s’impliquent personnellement dans l’entreprise et qui ont envie de marquer fortement l’histoire de Woodee, du Fat Bike, du Beach Cruiser et du vélo à assistance électrique. Nos Woodee seront d’ailleurs bientôt intégralement conçu, développé et assemblés à Hossegor même (dans nos tous nouveaux locaux qui s’appellent SUPERWOOD !), avec une offre de customisation qui devrait ravir nos clients.

Ce changement de marque et de principal équipementier a également été l’occasion d’attirer l’attention de grands professionnels du cycle qui contribuent désormais au design et au développement technique de nos Woodee. Le monde du vélo à assistance électrique n’a jamais été aussi inventif, et nous souhaitons faire bénéficier des meilleures innovations à tous nos Woodee Riders !

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